martes, 1 de noviembre de 2016

Permanecer en el océano - Diana Bellessi

Permanecer en el océano
 
Las diez mil cosas inofensivas no siempre
están ahí para ofendernos si no fuera
corta la mirada y sumergida en dolor
privado o temor que rige nuestro imperio
de los sentidos tan cercado por el miedo
de perder y no tener o en la mira siempre

el ojo clarísimo de la muerte atento
como una madre al tiempo de decir ya está
bien, ha vivido lo bastante por ahora
y visto las diez ml cosas extraordinarias
que florecen vuelan corren y se aparean
o sin remedio nada ha visto desatento

del milagro este ciego que en la rueda tiene
pan pero ha creído no tiene dientes y de hambre
muere hasta que el delicado ojo de la muerte
cierra los ojos ciegos para así la próxima
vez lo intente de nuevo entre las diez mil cosas
que expresan al mundo  y lo mantienen en él

no siempre están ahí para ofendernos, las vivas
cosas  y el monje negro de ojo clarísimo
en reverbero donde brilla la creación.
Demeurer dans l’océan

Les dix mille choses inoffensives pas toujours
sont là pour nous offenser sauf par
le court regard submergé dans la douleur
intime ou la crainte qui régit notre empire
des sens si entouré par la peur
de perdre et ne pas avoir ou toujours visé

l’œil très clair de la mort attentif
comme une mère au temps de dire ça
y est, pour l’instant vous avez assez vécu
et vu les dix mille choses extraordinaires
qui fleurissent volent courent et s’accouplent
ou sans choix rien ne vous avez vu distrait

du miracle cet aveugle qu'ayant du pain
dans la roue s'est cru sans dents et crève
de la faim jusqu’à ce que l’œil délicat de la mort
ferme les yeux aveugles pour que la prochaine
fois il l’essaie à nouveau  parmi les dix mille choses
qui expriment le monde et l’en gardent là

pas toujours sont-elles là pour nous offenser, les vives
choses et le moine en noir d’un œil très clair 
au réverbère où la création brille.





La canción resuena siempre - Diana Bellessi

La canción resuena siempre


El destino común
es aquello que vuelve,
a veces es la fe
quien va adelante o es
filo de la razón
que hiere pero otorga
un soberbio estado
de claridad que aquieta,
controla horror y sueño,
mas su destino es caer
tocada por su propio
filo y el desorden
que nunca es presa, es
trampa el orden, su ingenua
intención de encerrar
en un vaso el océano
Si se dieran lugar
cediendo como la voz
a la lengua y ésta
al misterio aunque alce
ladrillitos, casa o
nido de intimidad
donde se entienden, uno
a otro así debidos
lo pequeño y lo infinito
La balanza siempre está
a la vista, allí,
en la risa de un niño
o en el llanto o trino
de lo que muere y nace
y sobre todo ¡buen
día! aquí, en la mano
tendida. Intentamos
con la ley poner coto,
afán desmesurado
de ser donde perdemos
nuestro ser por jerarquía
Está bien, si imantada
por la fe nos uniera
la vara de esta ley
que separa y ordena,
sostenidos por otro
nos ponemos de pie,
no es la propia boca
aquello que queremos,
sino la intuición
de que lo propio vuelve
sólo desde lo ajeno
La mañana de invierno
acuna, la palabra
saciada en el silencio
habla, pero no si antes
no pasa por el trueque:
¡lindo el día!, ¿un mate?,
hasta la vuelta, siempre

La chanson résonne toujours


Le destin commun
est cela qui revient,
parfois c’est la foi
qui va en avant ou est
le fil de la raison
qui blesse mais octroie
un superbe état
de clarté qui apaise,
maîtrise l’horreur et le rêve,
mais son destin est de tomber
touchée par son propre
fil et le désordre
qui n’est jamais proie, est
un piège l’ordre, sa naïve
intention d’enfermer
dans un verre l’océan
S'ils se donneraient lieu
en cédant comme la voix
à la langue et celle-ci
au mystère bien qu'il lève
des petites briques, maison ou
nid d’intimité
où ils s’entendent, l’un
vers l’autre ainsi dus
l’infime et l’infinie
La balance est toujours
en vue, là,
dans le sourire d’un enfant
ou dans les larmes ou le chant
de tout ce qui meurt et naît
et surtout
bonjour! ici, la main
tendue. On essaie,
avec la loi, de mettre un terme,
une soif démesurée
d’être où nous perdons
notre être par hiérarchie
C’est bien, si aimanté
par la foi nous unissait
la mesure de cette loi             
qui sépare et ordonne,
soutenus par un autre
nous nous dressons debout
ce n’est pas la propre bouche
ce qu’on veut,
sinon l’intuition
de que le propre revient
juste depuis l’autrui
Un matin d’hiver
berce, la parole
rassasié dans le silence
parle, mais pas avant
de faire le troc:
beau jour!, un mate ?,
jusqu’au retour, toujours

Traducción: Raquel Heffes